Christensen fera plusieurs fois reporter l’examen du premier recours, au 25 juillet puis au 24 août, pour finalement épuiser le délais légal. Il ne s’agit que de gagner du temps puisque la requête a peu de chances d’aboutir : c’est le juge Ritchie qui doit s’en occuper. Les avocats auraient ensuite six mois en cas de rejet pour préparer le pourvoi devant la Cour suprême. Après avoir invoqué la mise à disposition tardive des transcriptions, Christensen prétextera vouloir attendre Hilton. Mais il attend surtout certaines garanties.
Le 27 juin, alors qu’il ne pouvait pas encore évoquer le verdict, Ed Rowan devait s’attaquer dans Solidarity au scepticisme de nombreux wobblies sur l’intervention du syndicat dans cette affaire. Il concède que Joe Hill n’a pas été arrêté dans un contexte de lutte particulier, n’a jamais dit ce qu’il faisait le soir du crime et n’a même jamais sollicité l’aide de l’organisation. Mais les wobblies ne devraient pas se laisser abuser sur la nature du procès. Rowan ironise sur les beaux principes de présomption d’innocence et de charge de la preuve : ici, c’est à l’accusé de « faire la preuve de son innocence contre les pires préjugés ». Les IWW « ne peuvent pas se permettre de perdre un rebelle de ce calibre » et se sont déjà trop engagés pour renoncer. Le président du Comité de soutien appelle tous les travailleurs à se manifester et à « récolter le plus de fonds possible » pour la bataille qui s’annonce.
Dans un nouvel article, le 11 juillet, Rowan rapporte le verdict sans surprise et rappelle qu’Hilton a été retenu pour les recours. Il ne sera cependant fait appel que lorsque l’argent requis sera réuni, ce qui n’est pas encore le cas. Rowan exhorte tous les IWW à apporter leur contribution, sinon « le fellow worker Hill est perdu ». D’après le Telegram du 13 juillet, Hilton affirmerait dans une lettre à MacDougall reçue le matin même n’avoir jamais été engagé pour cette affaire dont il ne saurait presque rien. MacDougall serait prêt à porter les recours.
Les réticences de certains wobblies et de Joe Hill lui-même à impliquer le syndicat ne suffisent pas à expliquer ce moment de flottement. Organisation des travailleurs les plus précaires, l’IWW n’a jamais roulé sur l’or, ne vit pas la période la plus faste de sa jeune histoire et se bat sur plusieurs fronts à la fois. En tout cas, la section locale de Salt Lake n’a pas les moyens de s’occuper seule de cette affaire. Enfin, s’il est l’auteur de nombreuses chansons populaires du recueil IWW, Joe Hill n’est encore pour beaucoup qu’un inconnu.
William « Big Bill » Haywood, peut-être sollicité par Hill lui-même, qu’il avait rencontré en 1912 à San Diego, prend la relève en une de Solidarity le 25 juillet : « Joe Hill sera-t-il assassiné ? » L’organisateur IWW, qui a grandi en Utah, imagine et décrit l’exécution puis le silence qui s’ensuivrait :
Avant l’aurore, lorsque l’aube pointera derrière les monts Wasatch, Joe Hill sera conduit depuis sa cellule de condamné vers la cour intérieure. On le fera s’asseoir cerné de gardes sur une caisse en pin brut — son cercueil —, les yeux bandés, une cible en papier épinglée sur la poitrine, à l’endroit de son jeune et vigoureux cœur battant.
Puis un peloton de six hommes s’alignera, fusils à l’épaule, dont un chargé à blanc. Au signal de l’officier, les six bourreaux appuieront sur la détente. Cinq balles transperceront le cœur de Joe Hill et sa voix mélodieuse se taira pour toujours. Jamais plus sa voix ne se fera entendre sur le campement hobo, dans le local syndical ni au boulot.
Ils vont tuer Joe Hill. Il a été condamné pour meurtre sur un amalgame de présomptions insignifiantes. Si l’État lui prend la vie, il n’y aura aucune circonstance atténuante en sa faveur, si ce n’est d’avoir tué un homme qui aura tant fait pour galvaniser la classe ouvrière.
« Shall Joe Hill Be Murdered ? », Solidarity, 25 juillet 1914
Haywood appelle à son tour à envoyer d’urgence de l’argent au Comité de défense à Salt Lake et à faire pression sur le gouverneur et le procureur pour obtenir un nouveau procès. La caution de la personnalité la plus connue et respectée du syndicat lance la campagne bien au delà du cercle d’amis et de la section locale de Salt Lake. Le soutien ne tarde pas cette fois à se manifester, en particulier dans les boîtes aux lettres des institutions de l’Utah.
Adressés au gouverneur Spry, au procureur général du comté de Salt Lake et au procureur de district Leatherwood, les messages arrivent des quatre coins du pays et de tous les milieux. Une semaine après l’intervention d’Haywood, la presse locale fait état de nombreuses lettres de protestation signées d’individus et d’organisations diverses. La plupart réclament un nouveau procès, un pourvoi ou la clémence, mais les journaux font leurs gros titres des messages les plus virulents, « menaçants », dont un « sinistre télégramme » tenant le gouverneur pour personnellement responsable de la santé de Joe Hill. Même s’il n’exclue pas en éditorial la possibilité d’une « erreur », le Deseret, quasi-organe de l’Église mormone, certifie l’impartialité du procès comme le bien-fondé du verdict et dénonce toute tentative d’« intimidation ».
L’International Socialist Review relaie de nouveau les appels à soutien dans son édition du mois d’août, par un entrefilet intérieur et une brève plus détaillée en fin de volume :
Le fellow worker Hill, auteur bien connu de nombreuses chansons du recueil IWW, reprises par des milliers de grévistes à travers le pays, a été condamné pour meurtre à Salt Lake City le 27 juin […] Les preuves sont purement circonstancielles et fournies par la police […] Aucun des témoins n’a formellement identifié le felllow worker Hill et les démarches ont été engagées pour faire appel.
Le procureur a sorti la vieille rengaine de l’égalité des pauvres et des riches devant la loi et autres fadaises habituelles.
Nous savons tous qu’un pauvre peut prétendre à la justice s’il a de quoi payer un bon avocat, sans quoi il n’aura pas plus de chances de s’en tirer qu’un flocon de neige en enfer. Nous ne doutons pas que chacun des lecteurs de la revue enverra ce qu’il pourra, quelques cents, un dollar ou plus au camarade Geo Child, trésorier du Comité de défense.
« Trying To Railroad A Rebel », ISR, vol. 15, août 1914, p. 126
Le mouvement s’amplifie à l’approche de la date de l’exécution. Une lettre de protestation envoyée depuis l’État du Washington, datée du 23 août, précise ainsi qu’une manifestation pour réclamer un nouveau procès s’était tenue à Seattle quelques jours plus tôt. Sur la côte Est, à New-York, un meeting rassemble le 29 août à Union Square plusieurs centaines de personnes, d’après le New York Herald, autour de personnalités IWW. Elizabeth Gurley Flynn, Joseph Ettor et Carlo Tresca demandent justice pour Joe Hill et l’associent au sort d’autres wobblies victimes de coups montés judiciaires contre leurs activités syndicales. Solidarity annonce le même jour qu’un encart spécial explicatif serait joint à chaque exemplaire du Little Red Song Book : « Les chansons du petit recueil rouge, auquel Joe Hill a tant contribué, seront le meilleur moyen de rallier les travailleurs à sa cause. »
Le 1er septembre, au terme du délais légal, non sans avoir tenté une dernière fois de faire reporter l’audience, Christensen soutient seul sa requête pour un nouveau procès. Il fonde sans illusion son recours sur le défaut de preuves et les incidents de procédure déjà assumés par le juge. L’État n’a jamais pu démontrer que la blessure par balle de Joe Hill le soir du crime avait un lien quelconque avec les assassinats. Joe Hill n’a été formellement identifié par aucun témoin ni aucun indice et ce n’est pas à lui de prouver quoi que ce soit. D’autre part, le fait « sans précédent » de lui avoir imposé ses premiers avocats en tant qu’« amis de la cour », alors qu’il les avait récusés, le déposséda de ses droits et lui aliéna les jurés. Christensen assure en outre avoir compris « au premier coup d’œil » que le jury, « sélectionné avec une science […] dont étaient dépourvus les avocats », ne serait pas impartial.
Pour Leatherwood, le condamné a eu droit à un procès légal, équitable et concluant. Sa peine devrait être exécutée « sans plus de cérémonie ». Le juge Ritchie est bien de cet avis et rejette la requête. Le seul argument rapporté par le Telegram pour justifier ce rejet porte sur la possibilité d’estimer à l’odeur depuis quand une arme du type de celle de Morrison avait pu tirer. Prétendant contester l’expertise produite à ce sujet par la défense, Ritchie dit avoir lu dans des comptes rendus du conflit en Europe que des officiers militaires reniflaient des armes afin de savoir si elles avaient servi.
Une demande de pourvoi, suspensive, est aussitôt déposée au greffe du comté. Le Deseret indique qu’Hilton se chargerait du recours devant la Cour suprême de l’État. Le 4 septembre, date prévue pour son exécution, Joe Hill écrit à un ami de San Francisco, E. W. Vanderleith. La première lettre de ce qu’il reste de sa correspondance carcérale, très tardif et lacunaire, exprime bien sa personnalité comme son attitude invariable depuis sa visite au docteur McHugh, près de huit mois plus tôt [1] :
Hé bien Van, nous voilà le 4 septembre, qui devait être mon dernier jour sur terre — mais je tripote toujours mon vieux crayon à mine et je pourrais bien vivre encore un bon bout de temps si je ne succombe pas de « haricose » (une toute nouvelle maladie).
[…]
Trêve de plaisanterie, Van, j’imagine avoir une longue attente devant moi […] je n’oublierai jamais la fraternité inlassable dont vous avez fait preuve à mon égard pendant mon procès […] mais le mieux à faire pour vous c’est de m’oublier et de consacrer votre énergie et votre argent au Grand Syndicat unique.
Je pense que certains d’entre vous en font trop à mon sujet de toute façon. Je voudrais que tu dises à tous ceux qui écrivent des poèmes sur moi que je n’ai rien de poétique. Je ne suis qu’un homme ordinaire, juste un rat des quais de la côte Pacifique, rien d’autre. J’ai toujours essayé de rester fidèle à mes amis et à ma classe. Ce que peuvent penser de moi des inconnus ne m’intéresse pas.
Letters, p. 7
Le recours sera validé en décembre, mais la Cour suprême ne siège que trois à quatre fois par an et le pourvoi ne sera pas examiné avant la session de mai 1915. Un fauteuil de juge associé doit d’ailleurs être investi entre-temps, à l’occasion des élections locales et nationales de novembre impliquant certains protagonistes de l’affaire.
Frank Scott s’est ainsi porté candidat à la Cour sous l’étiquette du Parti socialiste, mais il arrive bon dernier, loin derrière le juge William McCarty qui alterne les postes depuis une dizaine d’années. Leatherwood échoue de son côté à quelques voix près aux portes de la Chambre des représentants à Washington — ce n’est que partie remise. Son mentor le sénateur Smoot est réélu. Le mandat de shérif du comté de Salt Lake est également remis en jeu. John S. Corless, de la liste commune « démocrate et progressiste », remporte le scrutin haut la main et déloge le sortant. L’affaire Joe Hill relevant de sa juridiction, c’est lui qui serait chargé de l’exécution au pénitencier en cas d’échec des recours. Corless ne tarde pas à former son équipe.
L’inspecteur Cleveland est nommé à la direction de la prison du comté, d’où il pourra garder un œil avisé sur un de ses détenus les plus sensibles. Cleveland quitte donc la police de Salt Lake pour une sinécure aux émoluments plus confortables, sans doute en récompense de ses excellents états de service [2]. Son fidèle et réputé coéquipier Carl Carstensen, qui participa à la seconde arrestation de Wilson fin janvier, rejoint lui aussi l’administration du comté, à la direction des affaires criminelles.
Du côté de Joe Hill, le soutien se manifeste régulièrement sous toutes les formes — pétitions, protestations, poèmes — par courrier, par la presse ou dans la rue. Bien qu’encore assez discrète, l’affaire a désormais pris une tournure nationale et les IWW britanniques font même parvenir en décembre une collecte et une motion exigeant la libération de Joe Hill. Une section des United Mine Workers de l’Illinois alerte pour sa part l’autorité fédérale début janvier 1915, en lui demandant d’intercéder auprès du gouverneur et du procureur général de l’Utah pour garantir un nouveau procès.
Joe Hill quant à lui ne cesse pas son activité militante, gratifiant ses camarades de nouvelles chansons et d’autres contributions narquoises, dont un dessin en une de Solidarity et un article sur le sabotage dans l’International Socialist Review. Le Deseret fait même référence à l’une de ses chansons récentes, sans mentionner son auteur, reprise par les wobblies au cours d’une marche de chômeurs le 15 février 1915 : The Soupline song. Quelques semaines plus tard, Joe Hill pourra se réjouir auprès de son ami Sam Murray que cette dernière ait trouvé son chemin de San Francisco à New-York et « se répand comme la variole » parmi les chômeurs du pays.
En revanche, il n’évoquera jamais publiquement son affaire jusqu’au pourvoi et n’en parle guère plus dans sa correspondance connue, contrôlée par l’administration de la prison. Bien qu’il soit évidemment reconnaissant de l’aide apportée, il est néanmoins toujours aussi contrarié d’attirer autant d’attention et de moyens. Certaines manifestations de soutien le mettent même particulièrement mal à l’aise, comme il le rappelle fin mars 1915 à Vanderleith [3] :
Non Van, je ne déteste pas [ces] poèmes […] Je sais qu’ils sont bien intentionnés, ils sont chouettes, mais ça m’énerve d’être traité comme ça. Tu sais que j’ai toujours voulu me débrouiller seul, mais quelqu’un sur la côte a lancé le truc et me voilà martyr, Jésus en toc. Franchement, ça te ferait pas suer ?
Letters, p. 28
Sa ligne de défense peut expliquer en partie la discrétion de la plupart des organisations ouvrières à son égard jusqu’à présent, au moins en Utah. L’affaire aurait ainsi pu être abordée le 1er mai, en mémoire du Haymarket, mais elle ne figure pas à l’ordre du jour, consacré au massacre en cours en Europe. Organisée notamment par Virginia Snow Stephen, la célébration de la Fête internationale des travailleurs, en musique et polyglotte, s’ouvre sur la Marseillaise, reprend l’Internationale en suédois et The Red Flag, mais aucune chanson du barde wobbly n’est rapportée. Très œcuménique, elle rassemble de l’AFL à l’IWW, en passant par la Ligue de la jeunesse suédoise pour le socialisme et la tempérance. L’orateur du Parti socialiste n’est autre que le docteur Frank McHugh, l’homme qui dénonça Joe Hill.
Hilton est alors à Salt Lake pour préparer l’audience devant la Cour suprême. Programmée au début de la session, le 10 mai, celle-ci sera cependant reportée au 28 — d’après le Herald-Republican, les avocats ne seraient pas prêts à plaider. En réalité, le Comité de défense manque d’argent. Celui-ci enverra un appel relayé un peu tard par l’International Socialist Review de juin : « Notre fonds de défense est épuisé et nous sommes soumis à des demandes pressantes des avocats en honoraires et frais divers. » L’intervention d’une autre personnalité du syndicat, après celle d’Haywood, contribuera entre-temps à débloquer la situation.
Elizabeth Gurley Flynn profite en effet de son passage à Salt Lake début mai, dans le cadre d’une grande tournée nationale, pour rendre visite à Joe Hill. Tous deux s’écrivent régulièrement depuis quelques mois, à l’initiative du second, constituant le quart du reliquat de ses lettres de prison. Flynn évoque d’abord l’affaire au cours de son meeting le 5 mai, devant une salle comble :
Le peuple de Salt Lake ne croit pas Joe Hill coupable de meurtre. […] C’est parce qu’il est un IWW qu’il fut condamné à mort. On espère ainsi intimider les membres de l’IWW et détruire l’organisation.
« Says Hill Is Not Guilty », SLHR, 6 mai 1915
Son récit personnel de leur rencontre, en une de Solidarity le 22 mai, reprend cette argumentation. Quand Haywood en appelait plutôt à la solidarité ouvrière contre une justice de classe et la peine de mort, Flynn insiste sur les liens de Joe Hill à son syndicat, dont elle fait un symbole :
Il a cristallisé l’esprit de l’organisation dans une forme impérissable, des chansons du peuple — des chants populaires. [...]
Il ne s’agit pas seulement de l’individu, bien que je ne vois pas pourquoi nous ne devrions pas consacrer les fonds de défense à tout individu ; [...] Joe Hill incarne l’IWW pour le patronat et s’il peut être légalement assassiné, alors n’importe quel autre militant ou organisateur pourra l’être dorénavant. Abandonnerons-nous notre Joe Hill sans nous battre ?
Smith, 1969, p. 126
Sous bonne garde, l’entretien ne s’est pas déroulé dans la plus grande confidentialité. Flynn n’ignore d’ailleurs pas que l’actuel chef de la prison s’occupa de l’enquête. L’affaire elle-même n’a pas été abordée, curieusement résumée ainsi : « Ils l’ont accusé d’un acte ignoble, un meurtre pour un petit larcin, ont menti et menti au point de croire à leur propre mensonge. » Mais Joe Hill était de toute façon plus intéressé par l’actualité du syndicat, objet principal de leur correspondance. Compte tenu des circonstances, il paraissait plutôt en forme, serein et combatif.
Flynn tient en outre à démentir une rumeur souvent entendue au cours de sa tournée sur le soutien occulte d’une « femme aux moyens illimités » (sans doute Snow Stephen) et prévient qu’il faut également prévoir les frais d’un probable nouveau procès. Elle dit avoir vu passer à Salt Lake un télégramme des avocats requérant des fonds du Comité de défense — il manque trois cent dollars. Joe Hill n’a accepté qu’à contre-cœur l’aide du syndicat, après de longs mois de détention, et il ignore l’état de la caisse de soutien. Flynn appelle à faire en sorte qu’il n’ait pas à le savoir. « Lettres et télégrammes au gouverneur Spry seront utiles », assure-t-elle, « mais l’urgence absolue aujourd’hui c’est l’argent. »
Le 28 mai, Hilton et Christensen se rendent enfin devant la Cour suprême de l’Utah. Le procureur général Arthur R. Barnes accompagné de ses assistants Higgins et Iverson leur donneront la réplique pour l’État, puis les juges statueront. Les journaux notent une affluence inhabituelle pour ce genre d’audience. Avocats et soutiens de Joe Hill ont cette fois bon espoir de se faire entendre, dans un contexte moins défavorable et devant des magistrats indépendants du procès.